La vitesse comme facteur de risque des accidents de la route des jeunes adultes

Les accidents liés à la vitesse sont particulièrement fréquents chez les 18-24 ans. Entre 2019 et 2023, ils représentaient un tiers des accidents graves dans cette tranche d’âge.

Description de la situation

La vitesse excessive ou inadaptée est un important facteur de risque des accidents et blessures dans la circulation routière en Suisse (p. ex. [1–4]). Le risque d’accident et la gravité des blessures augmentent avec la vitesse [2,3,5,6]. 

Les conducteur·rices qui roulent à une vitesse élevée ont moins de temps pour réagir à un événement inattendu. Bien que le temps de réaction reste le même, la distance parcourue est plus longue à vitesse élevée. La distance de freinage augmente elle aussi, car elle est proportionnelle au carré de la vitesse. Les autres usager·ères de la route ont également moins de temps pour réagir à un véhicule qui approche à vitesse élevée [3].

Par vitesse excessive, on entend le dépassement de la vitesse maximale autorisée par la loi. En revanche, une vitesse inadaptée signifie que la vitesse n’est pas adaptée à l’état de la route, aux conditions de circulation ou à la visibilité actuels. 

Dans les pays de l’OCDE, les conducteur·rices de moins de 24 ans ont deux à quatre fois plus de risques d’être tué es dans un accident par rapport à leur part dans la population [7]. Les raisons principales de ce taux plus élevé d’accident sont probablement un manque d’expérience, des aptitudes insuffisantes en matière de conduite ainsi qu’un manque de maturité et une propension à la prise de risques [7].

Prévalence

Selon le sondage du BPA auprès de la population 2022, une part relativement élevée de conducteur·rices de voitures de tourisme indiquent rouler trop vite au moins de temps en temps. Ces proportions sont d’environ 75 % sur l’autoroute et hors localité, de 57 % sur les routes limitées à 50 km/h et de 47 % sur les routes limitées à 30 km/h [8].

La part de personnes qui déclarent rouler souvent trop vite est de 12 % sur l’autoroute et nettement inférieure à 10 % pour les autres régimes de vitesse. En particulier sur l’autoroute, la part de jeunes adultes parmi les personnes qui déclarent rouler souvent trop vite est nettement plus élevée (27 %) que leur part dans la population (12 %).

Ces données sont basées sur les déclarations des personnes interrogées. Il n’est donc pas à exclure que certaines personnes aient quelque peu sous-estimé la fréquence de leur comportement problématique (réponse socialement souhaitable). Étant donné que le sondage a été réalisé en ligne, cet impact ne devrait toutefois pas être très fort.

Les données objectives sont obtenues par le biais d’études d’observation ou de «Naturalistic Driving Studies» (NDS, voir note explicative 1). Selon une étude basée sur les mesures de vitesse de plus de 16 millions de véhicules sur les routes suisses, 31 % des conducteur·rices ne respectent pas la vitesse maximale autorisée [4,9]. Cette statistique ne fournit toutefois pas d’informations sur les tranches d’âge. Les données d’une NDS aux États-Unis montrent que les conducteur·rices de 16 à 24 ans présentent un odds ratio 1,5 fois plus élevé (voir note explicative 2) pour les excès de vitesse que les conducteur·rices de 80 ans et plus [10].

Dangerosité

Globalement, on estime que le potentiel de danger lié à une vitesse inadaptée est très élevé [11]. Si la vitesse moyenne sur la route augmente, le nombre d’accidents augmente lui aussi; la proportion d’accidents graves augmente également par rapport aux accidents mineurs.

Ce phénomène s’explique par des lois physiques qui ont été confirmées par de nombreuses études empiriques dans le monde entier [6]. La relation entre les variations de la vitesse moyenne et la fréquence des accidents dépend de la vitesse initiale. Une variation de la vitesse exprimée en pourcentage a un impact plus important lorsque la vitesse initiale est élevée. La meilleure façon de représenter cette relation est d’utiliser un modèle exponentiel [6].

La vitesse de circulation est particulièrement critique pour la sécurité des usager·ères de la route vulnérables (p. ex. les piéton·nes): leur sécurité dépend en grande partie de la vitesse au moment de la collision [12]. Selon une méta-analyse, les piéton·nes ont six fois plus de chances d’être tué·es lors d’une collision avec un véhicule roulant à 50 km/h que lors d’une collision avec un véhicule roulant à 30 km/h [13].

Impact sur l’accidentalité

Entre 2019 et 2023, la vitesse excessive ou inadaptée était la cause principale ou une cause concomitante de l’accident dans un tiers des accidents graves ou mortels des 18-24 ans dans la circulation routière, bien plus que la part correspondante pour l’ensemble des tranches d’âge (20 %) [14]. La part des accidents graves liés à la vitesse était clairement plus élevée chez les hommes âgés de 18 à 24 ans (36 %) que chez les femmes du même âge (25 %).

Les 18-24 ans sont souvent victimes d’accidents graves liés à la vitesse (18 %) par rapport à leur part dans l’ensemble des accidents graves (11 %). Ils·Elles représentent une part particulièrement élevée (20 %) parmi les principaux responsables des accidents graves liés à la vitesse.

La statistique des accidents enregistrés entre 2019 et 2023 montre par ailleurs que les 18-24 ans sont fortement surreprésenté·es parmi les passager·ères victimes de dommages corporels graves (17 %), notamment en ce qui concerne les accidents liés à la vitesse (30 %). La part de jeunes adultes est également très élevée dans les accidents graves liés à la vitesse impliquant des voitures de tourisme (28 %) et des motos (24 %). À titre de comparaison, les 18-24 ans ne représentent que 7 % de la population.

Notes explicatives

  1. Des études d’observation ou des «Naturalistic Driving Studies» (NDS) sont idéalement utilisées pour déterminer la prévalence des infractions au code de la route. Ces études sont considérées comme objectives, raison pour laquelle on leur attribue la plus grande valeur informative. Dans les NDS, le comportement de conduite est notamment enregistré sur une période donnée par différentes caméras embarquées. Il est ainsi possible d’estimer la fréquence (en pourcentage du temps de conduite) de différents comportements dans des conditions «normales» (sans accident). Les comportements sont relevés de manière très détaillée.
  2. L’odds ratio (OR) indique de combien varie la probabilité (en anglais: odds) qu’un événement se produise en raison d’un facteur d’influence. La première étape consiste à calculer la probabilité d’un événement en présence du facteur d’influence et la probabilité d’un événement en l’absence du facteur d’influence. Ces probabilités sont définies comme le rapport entre la probabilité qu’un événement se produise et celle qu’il ne se produise pas. Ces deux probabilités sont ensuite mises en relation (odds ratio). Comme le risque relatif, l’odds ratio peut prendre une valeur comprise entre 0 et l’infini. Là encore, un OR > 1 indique une corrélation positive [15].

Sources

[1] Hertach P. Geschwindigkeitskontrollen: Empfehlungen aus Präventionssicht. Bern: BFU, Beratungsstelle für Unfallverhütung; 2021. Forschung 2.401. DOI:10.13100/BFU.2.401.01.2021.

[2] WHO. Managing speed. Geneva, Switzerland: WHO; 2017.

[3] Van den Berghe W, Pelssers B. Dossier thématique Sécurité routière no 9: Vitesse et vitesse excessive. Bruxelles: Institut VIAS – Centre de connaissance Sécurité routière; 2020.

[4] Niemann S. Geschwindigkeit auf Schweizer Strassen: Pilotprojekt zur Erhebung des Geschwindigkeitsverhaltens von Motorfahrzeuglenkenden. Bern: BFU, Beratungsstelle für Unfallverhütung; 2020. Forschung 2.378. DOI:10.13100/BFU.2.378.01.2020.

[5] Adminaité-Fodor D, Jost G. Reducing speeding in Europe. Brussels: European Transport Safety Council ETSC; 2019. PIN Flash Report 36.

[6] International Transport Forum ITF. Speed and crash risk: Research report. Paris: ITF; 2018.

[7] Shinar D. Traffic safety and human behavior. 2nd ed. Bingley: Emerald Group Publishing Limited; 2017.

[8] BFU, Beratungsstelle für Unfallverhütung. BFU-Bevölkerungsbefragung 2022: Jährlich wiederkehrende Befragung der Schweizer Wohnbevölkerung zu Themen im Bereich der Nichtberufsunfälle. Bern: BFU; 2022.

[9] Niemann S. Geschwindigkeiten auf Schweizer Strassen. VSS Strasse und Verkehr. 2021; 107(12): 32–38.

[10] Perez MA, Sears E, Valente JT et al. Factors modifying the likelihood of speeding behaviors based on naturalistic driving data. Accident; analysis and prevention. 2021; 159: 106267. DOI:10.1016/j.aap.2021.106267.

[11] Walter E, Achermann Stürmer Y, Ewert U et al. Personenwagen-Lenkende und -Mitfahrende. Bern: BFU, Beratungsstelle für Unfallverhütung; 2015. Sicherheitsdossier Nr. 13.

[12] Ewert U, Scaramuzza G, Niemann S, Walter E. Der Faktor Geschwindigkeit im motorisierten Strassenverkehr. Bern: BFU, Beratungsstelle für Unfallverhütung; 2010. Sicherheitsdossier Nr. 06.

[13] Hussain Q, Feng H, Grzebieta R et al. The relationship between impact speed and the probability of pedestrian fatality during a vehicle-pedestrian crash: A systematic review and meta-analysis. Accid Anal Prev. 2019; 129: 241–249. DOI:10.1016/j.aap.2019.05.033.

[14] Hertach P, Uhr A, Achermann Stürmer Y et al. Sinus 2024: Sicherheitsniveau und Unfallgeschehen im Strassenverkehr 2023. Bern: BFU, Beratungsstelle für Unfallverhütung; 2024. DOI:10.13100/bfu.2.536.01.2024.

[15] Hertach P, Uhr A, Niemann S et al. Beeinträchtigte Fahrfähigkeit von Motorfahrzeuglenkenden. Bern: BFU, Beratungsstelle für Unfallverhütung; 2020. Sicherheitsdossier 2.361. DOI:10.13100/BFU.2.361.01.

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